Le Mandat de Protection Future

Art 477 à 494 C Civ. Donne le pouvoir d'organiser à l'avance sa propre protection (ou celle de son enfant) et évite ainsi l'ouverture d'une mesure judiciaire d'incapacité (Tutelle ou Curatelle). C'est donc un Mandat qui obéit aux règles de Droit commun édictées par les articles 1984 à 2010 du C Civ.

Qui peut donner Mandat ?

Toute personne majeure peut donner, à une ou plusieurs personnes, mandat de la représenter pour le cas où elle ne pourrait plus pourvoir seule à ses intérets en raison d'une altération de ses facultés au sens de l'article 477 al1 CCiv. (NB : Le Mandat pour autrui existe aussi mais sous certaines conditions. Une personne sous curatelle peut aussi en rédiger avec l'assistance de sons curateur). Des parents ayant un enfant handicapé, peuvent aussi organiser sa protection juridique à l'avance pour le jour où ils ne pourraient plus s'occuper de lui. 

L'altération des facultés :

Elles doivent être médicalement constatées décrivant les conséquences de celles-ci sur la vie civile de la personne, et doivent mettre dans l'impossibilité de pouvoir seule à ses intérêts (art 425 CCiv.). Ce certificat ne peut être délivré que par un médecin inscrit sur la liste du Procureur de la République. L'altération porte le plus souvent sur les facultés mentales. Une altération de ses facultés physiques peuvent justifier une mesure de protection lorsque celles-ci empêches l'expression de ses volontés. Une mesure de protection doit être révisée régulièrement.

Qui peut être mandataire ?

Le mandataire est librement choisi par la personne qui désire le mettre en place pour sa propre protection (le Mandant). Il peut s'agir d'un proche, comme d'un professionnel (Notaire, Avocat, Conseiller en Gestion de Patrimoine, ...). Le problème étant que le Notaire qui a rédigé l'acte ne peut pas vraissemblablement être désigné comme Mandataire car il ne serait pas évident pour lui de contrôler l'éxécution du Mandat.
Une personne morale, comme un organisme inscrit sur la liste des mandataires judiciaires, peut aussi être mandataire. 

Forme juridique du Mandat :

  • Le Mandat Notarié : est totalement libre dans sa rédaction et peut être rédigé par un seul Notaire (art 489 al1 CCiv.), et l'acceptation du Mandataire est aussi donnée par acte authentique. Le temps que le Mandat n'a pas pris effet, celui-ci peut être modifié (par acte authentique) et révoqué (notifée au Mandataire et au Notaire, sans requérir pour autant la forme authentique cette fois-ci). Le Mandataire peut aussi, de son côté, renoncer au Mandat en le notifiant au Notaire ayant rédigé l'acte. 
  • Le Mandat sous seing privé : il doit soit être établi suivant un modèle défini par le Ministère de la Justice (Cerfa 13592*02). Si ce document n'est pas utilisé, le Mandat doit alors être contresigné par un Avocat. Une Notice d'information rédigée par le Ministère de la Justice accompagne le modèle de Mandat. 

Le contenu du Mandat :

  • Le mandat peut porter sur la Protection Patrimoniale et la mission confiée au Mandataire est librement définie : sur telle ou telle catégorie de biens, sur les pouvoirs octroyés (plus importants lorsque l'Acte est Authentique devant Noataire), rémunération ou non du Mandataire, etc ...
  • Le mandat peut porter sur la Protection Personnelle, et le contenu du Mandat est imposé par la Loi.

Prise d'effet du Mandat :

Le Mandatire doit  produire au Greffe du Tribunal d'Instance du lieu de Résidence du Mandant avec le certificat médical mentionné plus haut. Et contrairement à un régime de protection judiciaire, aucune publicité n'est faite, car le régime de protection future entraine un régime de représentation et non un régime d'incapacité. 
Idem pour le Mandat pour autrui qui peut aussi prendre effet au décès du dernier des deux parents. 

Les Pouvoirs du Mandataire :

Dès que le Mandat a pris effet, le Mandataire peut agir au nom et pour le compte du Mandant. Le Mandataire peut donc (en fonction de la volonté exprimée par le Mandant), effectuer des actes Conservatoires, des Actes d'Administration et surtout des Actes de Disposition (si le Mandat a été établi par Acte Notarié). Tous les actes donnés au Mandataires doivent être précisés dans le Mandat (surtout en ce qui concerne les actes de dispositions). On peut imaginer aussi qu'il y ait une analogie entre un Tuteur et les pouvoirs d'un Mandataire, par exemple, pour les actes de dispositions à titre gratuit, il peut être logique que l'autorisation du Juge des Tutelles soit requise. 
Un Mandat qui aurait été établi sous seing privé, semble en revanche être limité à des actes conservatoires. Pour les autres cas, le Juge des Tutelles devrait intervenir (art 493 CCiv.)

Les Obligations du Mandataire :

Pour le Mandataire (l'exécuteur du Mandat), ceci est une charge personnelle. Pour les actes de gestion de Patrimoine, il peut faire appel à un tiers, mais répondra personnellement selon les règles de droit commaun du mandat. 

  • Inventaire des Biens : s'il a été chargé de l'administration des biens, le Mandataire a l'obligation de faire procèder à un inventaire lors de l'ouverture de la mesure de protection (art 486 CCiv.) et doit être établi sans délai et doit être actualisé régulièrement.
    S'il s'agit d'un Mandat sous seing privé, la conservation de l'inventaire initial incombe au Mandataire et est tenu de le présenter au Juge des Tutelles ou au Procureur de la République qui en ferait la demande.
    ​Si le Mandat a été conclu par Acte Authentique, c'est le Notaire qui a établi le Mandat qui assure la conservation de l'inventaire initial et de ses actualisations. 
  • Comptes de Gestion : des comptes annuels selon les modalités prévues par le Mandat sont établis, et le Juge peut en demander la vérification.
    Dans le cas d'un Acte Authentique, le Notaire qui a rédigé l'acte est chargé de contrôler les comptes et doit saisir le Juge des Tutelles en cas de mouvement de fonds ou de tout acte non justifié ou non conforme aux stipulations du Mandat. Le Notaire est rémunéré pour cette gestion selon un tarif réglementé.
    Le contrôle des comptes est en revanche plus souple lorsque le Mandat a été conclu sous seing privé en fonction qu'il ait été ou non contresigné par un Avocat. 
    Les cinq dernières années de comptes doivent toujours être conservées. 

Contrôle de l'éxécution du Mandat :

Les modalités sont librement fixées par le Mandat (art 479 al3 CCiv.). Une ou plusieures personnes peuvent être désignées en plus du Notaire pour contrôler l'activité du Mandataire. Dans le cas d'un Mandat sous seing privé, le modèle Cerfa prévoit les modalités de contrôle. 
Le Juges des Tutelles ne peut pas modifier le contenu d'un Mandat ou restreindre les pouvoirs du Mandataire, mais exerce un contrôle sur l'éxécution du Mandat, et tout personne intéressée peut saisir le Juge pour contester la mise en oeuvre du Mandat ou le voir statuer sur les modalités de son exécution (art 484 CCiv.). Le Juge peut même révoquer le Mandat si les agissements du Mandataire portent atteintes aux intérêts du Mandant. Inversement, si le Juge trouve le champ d'application du Mandat insuffisant pour assurer la protection des intérêts du Mandant, le Juge peut autoriser les Mandataire (ou une autre personne) à accomplir un acte déterminé et non couvert par le Mandat, ou encore ouvrir une mesure de protection juridique complémentaire. 

Rémunération du Mandataire :

est par principe à titre gratuit sauf si stipulation contraire dans le Mandat. En revanche, tous les frais exposés par le Mandataire dans l'accomplissement de sa mission, doivent lui être remboursés.

Responsabilité du Mandataire :

Nous sommes toujours dans le Droit Commun (art 424 CCiv.). Il doit répondre de ses fautes dee gestion, de son dol, et sa responsabilité peut être plus sévèrement appréciée s'il est rémunéré. 

Sort des Actes passés par le Mandant :

Le Mandat de protection future fonctionne comme une procuration et le Mandant conserve sa capacité juridique. Seulement dans des cas ou l'opération passée par le Mandataire serait de nature inutile, en fonction de la consistance du Patrimoine, et en fonction de bonne ou de mauvaise foi, les héritiers pourraient, par la saisine du Juge, demander une action en récision ou une réduction. Néanmoins, à part dans des cas très particuliers, les actes restent juridiquement valables. 

La Cessation du Mandat :

  • rétablissement des facultés personnelles du Mandant par la production d'un certificat médical adressé au Greffe du TI
  • le décès du Mandant
  • le placement sous Curatelle ou Tutelle, sauf décison contraire du Juge des Tutelles
  • le décès du Mandataire, son placement sous une mseure de protection, la déconfiture de la personne morale
  • la révocation du Mandataire par le Juge des Tutelles

L'ouverture d'une sauvegarde de Justice ne met pas fin au Mandat, mais le Juge peut en suspendre les effets. 

Obligation du Mandataire à la fin du Mandat :

  • il doit continuer à assurer la liquidation de la sucession
  • doit tenir à disposition des héritiers les cinq dernières années de comptes de gestion ainsi que toutes les pièces
  • doit conserver tous documents durant les cinq années qui suivent

Le Mandat de Protection Future est un outil juridique encore récent au niveau du Droit. C'est un outil, je trouve, fabuleux, mais pour une raison inconnue, et qui m'échappe encore, très peu, trop peu conseillée par la profession du Notariat ...
Le Mandat de Protection Future ne s'adresse pas qu'aux personnes âgées. J'ai envie de dire qu'il s'adresse avant tout à toute personne qui s'est construit un Patrimoine Privé et Professionnel et qui n'a pas envie de voir celui-ci trouvé à l'abandon à la suite d'un accident de la circulation par exemple, une période de coma, une grave maladie qui peut être temporaire. Il faut comprendre que le Mandat de Protection Future est la protection de ses biens et de son Patrimoine financier de son vivant ! Ce n'est pas un Testament qui lui, ne produit ses effets qu'au décès.
Si ce n'était à préciser, nous trouvons le Mandat sous seing privé "dangereux" pour le Mandataire, et tant qu'à faire vouloir se protèger ainsi que ses biens, autant le faire le plus précisément possible dans un acte authentique où tout sera écrit limitativement ou le plus largement selon les souhaits de la personne à protèger.