L'insaisissabilité du Contrat d'Assurance Vie

Le cratère juridique de la stipulation pour autrui du Contrat d'Assurance Vie conserve tout son sens, même encore aujourd’hui. Est réservé à la seule administration fiscale, la possibilité de saisir le contrat, à l'exclusion des autres créanciers pour lesquels la primauté du droit des assurances continue de s'appliquer.

Cette disposition est la résultante d’une jurisprudence constante et s’appuie sur l’art 1121 C Civ. :   « la stipulation pour autrui ». La stipulation pour autrui est une structure dans laquelle on retrouve un stipulant (le souscripteur), un promettant (l'Assureur) et un tiers bénéficiaire (le bénéficiaire décès).
En cours de contrat, il est impossible de savoir à qui seront versés les capitaux. Ils le seront, soit au bénéficiaire en cas de vie (le souscripteur), soit au bénéficiaire en cas de décès.
Le bénéficiaire a vocation à percevoir ces sommes au décès du souscripteur assuré. Et à ce titre, il acquiert un droit immédiat sur les primes versées dès le jour de la souscription du contrat. Ce droit immédiat sur les sommes versées dessaisit le souscripteur de la propriété des sommes versées, sans pour autant les attribuer de suite au bénéficiaire décès. Les sommes sont donc en attente d'affectation, et l'Assureur en est juridiquement le propriétaire.
Concrètement, les sommes versées n'appartiennent plus au souscripteur. Il pourra néanmoins en redevenir propriétaire en exerçant son droit de rachat auprès de l'Assureur. Cette particularité juridique peut paraître surprenante et est nécessaire pour appréhender deux caractéristiques majeures du contrat d'Assurance Vie, à savoir :

  • le principe de « hors succession »
  • et l'insaisissabilité du contrat d'Assurance Vie.

Le caractère hors succession de l'Assurance Vie

Le souscripteur se dessaisit des sommes versées au profit de l'Assureur. Les sommes versées ne font donc plus partie du patrimoine du souscripteur. On peut en conclure qu'en souscrivant un contrat d'Assurance Vie, le souscripteur s'appauvrit patrimonialement parlant. Cette caractéristique, à priori négative, est pourtant à la base du plus gros avantage procuré par le contrat d'Assurance Vie.Lors du décès du souscripteur, son patrimoine forme son actif successoral et sera partagé, après paiements des droits, entre les héritiers. L'Assurance Vie, ne faisant pas partie du patrimoine du souscripteur, sera traitée en dehors de sa succession, donc en toute franchise de droits, et permet de nommer des bénéficiaires autres que ses héritiers.

Dorénavant il faut tempèrer cette interprétaion. En effet, seul le contrat d'assurance vie du défunt est hors succession. Le contrat d'assurance vie du conjoint survivant, entre (dans certains cas seulement) pour moitié dans la succession du défunt mais en valeur seulement. Le but de cet article n'est pas de détailler tous les cas, mais seulement d'en comprendre la substance.
N'hésitez pas à nous consulter.

Le caractère insaisissable du contrat d'assurance vie

Le contrat d'Assurance Vie ne faisant plus partie du patrimoine du souscripteur, il est donc impossible à saisir. Toutes les décisions de justice correspondantes sont venues confirmer ce caractère d'insaisissabilité. Toutefois, les excès en la matière seront annulés. Ainsi, il n'est pas permis d'organiser son insolvabilité en plaçant son patrimoine sur un contrat d'Assurance Vie. A noter, que ces caractéristiques n'existent que grâce à la présence du bénéficiaire, faisant ainsi de cet intervenant, le pilier juridique du contrat d'Assurance Vie.
L'article 1121 du Code Civil stipule que « celui qui a fait cette stipulation [la désignation du bénéficiaire par le souscripteur] ne peut la révoquer si le tiers [le bénéficiaire] a déclaré vouloir en profiter ». Autrement dit, si le bénéficiaire manifeste sa volonté d'accepter le bénéfice du contrat fait à son profit, il devient impossible pour le souscripteur de le révoquer sans son accord. Il s'agit de la célèbre et controversée acceptation du bénéfice du contrat.
L'assurance-vie est insaisissable : les créanciers du souscripteur ne peuvent donc effectuer une saisie sur le contrat avant son terme. Cette caractéristique apporte une excellente protection des sommes investies contre les tiers.
N'interprétez donc pas ce qui n'a pas été dit, et rien n'a été pensé en sous marin. Il n'est pas conseillé de souscrire un contrat d'assurance vie dans le seul et unique but de ne pas payer ses dettes. Le caractère insaisissable du contrat n'empêche pas que toute dette contractée reste dûe. En revanche, il est bon de mettre en avant le contrat d'assurance vie par rapport à un compte d'épargne bancaire classique qui, lui, peut être, a minima, bloqué très rapidement, vous empêchant de prendre le temps nécessaire de vous sortir d'une impasse juridique ou financière passagère. Il n'est pas inutile non plus de rappeler que toute fraude à la Loi, ou intention maline de contourner la Loi, peut remettre en cause tout montage juridique.

Les contrats d’assurance-vie sont désormais saisissables, mais par le fisc uniquement

C'est la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 qui vient de changer la pratique en revenant sur ce principe d'insaisissabilité. L'article 41 de la loi sur la fraude fiscale a remis en cause cette jurisprudence en autorisant expressément, à compter du 8 décembre 2013, le recours à des actes de saisie sur les sommes versées sur certains contrats d'assurance-vie.
La loi vise expressément les actes de saisie suivants :

  • l'avis à tiers détenteur, pour le recouvrement des créances d’impôts, quelle que soit la catégorie d'impôt concernée, qu'il s'agisse d'impôt en principal, de pénalités ou de frais accessoires
  • les oppositions à tiers détenteur, pour le recouvrement des recettes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics
  • les saisies à tiers détenteur, pour le recouvrement des produits divers de l'État
  • les oppositions administratives, pour le recouvrement forcé des amendes et condamnations pécuniaires (PV de stationnement par exemple)

Nouveau : La justice peut confisquer le contrat d'assurance vie !

Dans un arrêt daté du 30 octobre 2012, la Chambre criminelle de la Cour de cassation, 12-84.961 ... mais vous remarquerez que c'est bien la Chambre Criminelle ... la Cour a gelé nous allons dire toute modification et utilisation du contrat d'assurance vie

Restent insaisissables tous les contrats non rachetables :

  • les assurances temporaires en cas de décès,
  • les rentes viagères immédiates ou en cours de service,
  • les assurances de capitaux de survie et de rente de survie,
  • les assurances en cas de vie sans contre-assurance,
  • les rentes viagères différées sans contre-assurance.

Article de Presse du 11 Avril 2014, dans l'Argus de l'Assurance, à Lire